Je garde mon petit hôtel de l’avenue de Clichy. Celui dont
certains collègues disent qu’il est désuet.
C’est un petit trois
étoiles vieillot, avec des chambres pas trop spacieuses et du plancher qui
grince, et un ascenseur dans lequel on
ne peut entrer que seul avec une valise.
A la réception un jeune asiatique très efféminé, accueille
toujours avec des exclamations exagérée, qui donnent l’impression qu’on revient
un peu dans la famille. Il nous appelle par nos noms, drague un peu les mecs,
le narkeotrafic fait fantasmer… Il
suffit de faire trois pas dans la rue, de tourner une de liège, de passe la
place de l’Europe et en 5 minutes, on se retrouve au siège de notre grand
Institut de narkeotrafiquants. Je commence à me sentir un peu chez moi dans ce
coin-là. C’est rassuant quand on vient de sa province, juste pour une réunion,
et qu’on sait qu’on ne verra que le tgv, sa chambre d’hôtel, et la salle de
réunion du siège, de savoir qu’on ne va pas passer des heures un plan dans une
main, la valise dans l’autre, à chercher la bonne rue. Pace que quand on est
perdu dans une grande ville, on a plus de chance de demander son chemin à un
touriste qu’à un autochtone, qui, s’il l’est ne connait même pas les trois rue
qui l’éloigne de son trajet quotidien. J’aime toutefois me perde dans Paris,
mais seulement quand je n’ai pas de bagage trop lourd, pas de chaussures neuves
(ce qui ne m’arrive plus depuis longtemps), et que j’ai un peu d’argent en
poche pour me poser dans un café et boire un diabolo menthe bien vert. J’aime
me dire que ma carte Culture me permet de passer dans tous les Musées nationaux
en coupant les files et que je vais aller me poser devant une sculpture la
regarder une heure et repartir sans me dire qu’au prix du billet il faut que
j’en voie le plus possible.
Bref, je reviens au petit hôtel de l’avenue de Clichy. Je
l’ai dit donc j’aime m’y retrouver. Sauf que. Sauf que.
Dans la grande maison des narkeotrafikants, y’a pas que des
narkeotrafikants qui vivent sous des
tipis, mangent des graines, et militent à la cnt… Y’a aussi des réflechisseurs
qui réfléchissent à la bonne marche du système et mettent de l’ordre dans les
cerveaux des gratteurs de cailloux.
En ce moment, enfin depuis quelques années comme partout, le
jeu c’est de faire faire à l’extérieur des tâches qui étaient assumées de
manière parfaite par des petites mains de la boîte.
Longtemps l’impression des rapports se faisait maison, comme
l’infographie et la mise en page. Puis on a fait imprimer par des petites
entreprises extérieures, qu’on pouvait avoir en direct live quand une photo de
silex était placée tête à l’envers. Et puis il y eut l’idée de la charte
graphique, tous les rapports imprimés avec la même police, la même marge la
même page de titre. Et ça, il parait qu’il valait mieux que ce soit fait à
Paris. Donc gros marché, donc toutes les petites entreprises régionales
zappées, donc prix moins élevés, donc c’est tout bénef !!!
Sauf que quand il y a
la moindre erreur, entre les appels téléphoniques, les heures à faire
comprendre que le silex tête en bas c’est pas la même chose que tête en haut…
Le bénef bat de l’aile.
Longtemps le ménage de nos locaux fut assuré par une petite
boîte de trois martiniquais sympas qui nous offraient du rhum arrangé pour nos
anniversaire, qui venaient discuter un peu quand ils passaient le balai dans
nos bureaux, et qui ont toujours su que si un seau plein de terre traînait dans
un coin ou qu’un tas de cailloux était posé parterre ce n’était pas poubelle.
On les aimait bien nos trois hommes de ménage.
Sauf que.
En début d’année, on change tout. On vire la petite société
et on fait un appel d’offre pour trouver une grosse boîte de nettoyage qui fera
tout plus vite et moins cher.
Sauf que depuis fin mars, la nouvelle société, qui doit
payer ses employés au lance pierre car elle a baissé son devis de 50 % pour
avoir le marché, a déjà fait passer quatre personnes différentes, qui viennent
deux fois et jettent l’éponge. Donc chaque fois, il faut ré-exliquer que les
cailloux, la terre, les bouts d’os c’est pas poubelle, qu’on fait super gaffe
quand on trouve des morceaux de vaisselle posés sur un bureau c’est peut-être
cassé et moche, mais pas à jeter. Et qu’un os qui traîne sur une table, c’est
pas forcément un os de poulet du repas de midi.
Sauf que c’est pas cher mais c’est mal fait.
Et puis cherry on the cake, il y a la société qui fait les
réservations pour les déplacements. Avant, en région la personne qui faisait
l’accueil et le standard se chargeait de réserver les tgv, les hôtels,
changeait si ça n’allait pas sans faire trop d’histoires. Depuis quelques
années pour permettre à l’accueil de ne faire que du standard, on a trouvé the
solution. Centrale de résevation. Et voilà que tu te retrouves avec un hôtel à
l’autre bout de la ville, quand t’as pas de voiture, un hôtel fermé le lundi
soir en rase campagne alors que tu as une résevation pour la nuit, et autre
réjouisance.
Je vais donc me faire un plaisir de faire remonter à
monsieur Globéo qui a remplacé monsieur Carlson, que le médian congrès de la
porte de Clichy qui affiche trois étoiles c’est de la grosse daube. Au bord du
périph, à deux kilomètres du métro porte de Clichy. Quand t’arrive on te
demande de présenter ton voucher (prononcer Vaoutcheur) qui est la réservation,
sinon tu dors dehors tant pis pour toi. Puis t’arrives dans une chambre au 7ème
étage, clim in-réglable, mouchoirs in-jetables, pas de corbeille à papier ni de
poubelle de salle de bain, lavabo in-vidable pour le vider il faut écoper dans
la baignoire… Puis on passe au petit dej. Mon moment préféré quand je suis dans
un hôtel. Le bistrot de Prosper, c’est le nom de la salle. Il y en a une avec
les petits dej’ à 14 euros, plus cosy, avec des nappes blanches, une jolie hôtesse
jeune et métisse et souriante dans son tailleur. Chez Prosper c’est pas le même
topo. Ca grouille de monde et les nappes sont des toiles cirées immondes. Des
femmes en tabliers marron genre filles de salle, nettement moins fringantes, s’agitent
pour nettoyer les tables à grands coups de pulvérisateurs et chiffons sales. Moi
j’aime me réveiller doucement sans bruit. Là c’est l’ambiance hall de gare, il ne
manque que le bruit du tgv qui freine en gare.
Je ne parlerai pas du pain dur, du jus de fruits dégueu qu’il
faut obtenir après avoir fait la queue devant un distributeur douteux, et du
distributeur de lait que donne de l’eau chaude, des viennoiseries que l’on est
obligé de poser dans des assiettes à peine essuyées. Le croissant et le pain mouillés ça me fait gerber… quant aux tasses j’ai
dû en prendre deux avant de devoir demander qu’on en lave une juste pour moi.
Résultat j’ai bâclé mon petit dej en 4 minutes et ça c’est
pas bon du tout. Je suis remontée dans ma chambre plutôt de très mauvais poil.
Et je me suis cassée de cet endroit de m… qui se la joue
trois étoiles chicos et qui ne vaut pas un kopek.
La prochaine fois, si on ne me rend pas mon hôtel de la rue
de Clichy je boycotte les réunions.
Ce qui m’agace c’est que je vais écrire à monsieur Globéo, et qu’il s’en tape.
Si on avait encore notre collègue qui réserve, je lui dirais
cocotte y’a eu erreur de casting cette fois ci, alors tu me mets le médian
congrès sur liste noire et tu le files plus à personne.
Alors pour résumer, l’externalisation est une mauvaise
solution, au final personne n’y gagne, dans la boîte en tout cas.
J'avoue, l'externalisation, ça pue :(
RépondreSupprimerL'externalisation c'est comme la mondialisation : c'est bon pour les bénéfices, mais dramatique pour l'humain !
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