Dans
son bureau, vilain comme tout, installée
dans un vieux fauteuil moitié voltaire moitié art déco, tellement que je sais
pas comment on à l’idée de faire un meuble comme ça, elle me regarde.
Je
la connais déjà un peu. J’étais venue la voir il y a quelques années,
désespérée et fâchée contre mon généraliste. Il persistait et signait : la
douleur aux cervicales qu’il soignait depuis deux mois à coup de myorelaxants,
allait beaucoup mieux. Sauf que moi, je ne le ressentais pas. J’étais de
mauvaise humeur, et épuisée.
Elle,
elle a commencé par prescrire une radio, et m’a donné une liste longue comme le
bras de petites boules blanches à prendre pour me faire partir cette douleur.
Elle m’a aussi expliqué un tas de trucs, que j’écoutais à moitié sur le pourquoi
du comment j’avais aussi mal. Quand je suis sortie de chez elle, sincèrement je
ne voyais pas comment ignatia et compagnie allaient dégommer cette sale
douleur.
Je
ne me souviens plus combien de temps cela a pris, mais assez rapidement, j’ai
oublié cette douleur. Normal elle avait disparu.
Certains
disent que c’est une question de croyance, que les petites boules sont un
placebo et que tout ça, c’est dans la tête.
Et alors ???
Je
ne sais pas pourquoi (enfin si la consult est à 50 euros), j’ai attendu aussi
longtemps pour aller la consulter à nouveau pour mon dos.
J’avais
vite compris, moi qui ne connaissais pas le mal de dos, que son arrivait,
s’était calée pile poil, sur le jour ou la gazelle s’est fait frapper par
« soncoeursonamour » puis a disparu en faisant croire qu’elle s’était
suicidée. Ce jour là la douleur aux cervicales est revenue, puis elle est
descendue une semaine plus tard quand le nounours m’a fait son entourloupe en
vacances dans les Landes (voir une note d’Aout 2011).
Ca
doit s’appeler somatiser.
Et
même si l’IRM montre une protrusion minime entre deux lombaires, même si je
marche depuis plus d’un an à coups de tous les médicaments antidouleur que les
médecins prescrivent, rien ne fait passer cette douleur. J’ai mal, j’ai mal,
mais ce n’est pas grave alors il ne faut pas en parler. Il faut supporter. Se
taire. Parce que ça lasse les personnes qui se plaignent de leurs petits bobos.
Et c’est vrai.
Donc
une IRM, deux ostéo, une rhumato, et quelques génaralistes et aussi un compte
en banque positif plus tard, j’ai repensé à mon docteur des petites billes
blanches.
Et
un mois plus tard je me suis retrouvée dans son cabinet. Elle est drôle cette
femme. La soixantaine. Une sorte de babacool, peace and love à mort. Longs,
longs, très longs cheveux bruns qu’elle laisse libres, longs jusqu’aux fesses.
Elle doit faire une natte la nuit, ça se voit aux crans réguliers. Fringuée
d’un vieux pull genre poil de lamas, et d’un jean ni slim, ni pat d’eph’, juste
moche. Parfois elle te reçoit pieds nus. Le matin. Elle fait des séances de
sophro à ses heures « perdues ». Dans son bureau des tas de dossiers
sont empilés partout dans tous les coins, c’est très mochement décoré je l’ai
déjà dit, peinture vert amande, carrelage genre marbre, et meubles dépareillés.
On sent qu’on n’est pas dans le dernier cabinet chic qui en jette.
Mais
on s’en fout parce qu’elle elle te regarde. Elle t’écoute. Elle te questionne.
Elle te regarde avec son regard que t’as l’impression qu’elle va te prendre
dans ses bras et te serrer contre elle et te faire un gros câlin. Elle te pose
les trop bonnes questions. Avec un sourire doux de maman qui te comprend. Et
rien que ça déjà, ça te fait énormément de bien. Bon, moi, comme mon œil
insolent est toujours à l’affût, je suis partagée entre l’envie de rire devant
ce sourire de madone compatissante, et de verser ma larme face à ce regard
tellement « à l’écoute ». Pendant une bonne vraie heure, elle écoute,
elle explique. Des mots sur le pourquoi du comment de la douleur. Je dois
avouer que je n’ai pas totalement compris toutes les explications. Il y a une
histoire de colère que j’ai éprouvée, et qui n’est pas sortie de la bonne
façon, et d’envie que j’ai en moi d’aller bien. Il y a mes crampes et mes
crispations, mon envie d’avoir les pieds en dehors de la couette la nuit, mon
désir de boire de l’eau froide. Elle me demande si je comprends je dis oui même
si je mens un peu. Ce que je comprends c’est que j’ai pu un peu parler de cette
douleur et de ce qui l’avait déclenchée. Et j’ai une énorme envie de pleurer et
de laisser couler mes larmes. Mais je ravale.
La
liste des petits tubes bleus prescrits est impressionnante. Je vais devoir
ingurgiter trois par trois, trois fois par jour, un nombre incalculable de petites
billes blanches. Plus un immonde liquide, trois fois par jour aussi, qui les
premiers jours m’a presque fait vomir.
Alor
j’ai décidé d’y croire. Et ça marche. Placebo ou pas, sucre ou pas.
Je
ne réveille plus en pleine nuit pour mettre mes pieds hors de la couette, me retourner dans mon lit n’est plus une
douleur qui me tire de mon sommeil. Je me lève de mon canapé sans être moitié
pliée en deux. Je marche dans les couloirs du bureau sans être ralentie par ce
point que j’avais au dessus du sacrum.
Il
m’arrive le soir d’avoir encore un peu mal. Ce n’est vraiment le point douloureux
qui a disparu mais plutôt toute la contracture musculaire qui était autour de
ce point. La protrusion est là et toujours bien là. Mais mon dos est plus décontracté.
Demain
je vais de nouveau voir mon docteur baba. Il me tarde de voir son immense
sourire. Je suis certaine qu’avec quelques petites billes blanches de plus je
vais retrouver la forme avant le printemps. On y croit on y croit !
On y croit on y croit et ....j' y crois . Une maladie auto-immune parait-il inguérissable et celà fait maintenant plus de dix ans, plus rien !!!! Des tas de petites pilules avalées durant quelques semaines prescrites par un " vieux sage " et miracle des années de gagnées là où la médecine traditionnelle échouait où plutôt m' empoisonnait .
RépondreSupprimerDes pillules miracles ??? pour un esprit cartésien difficile d' y croire et pourtant .....
Boutoucoat