jeudi 9 décembre 2010

Dire merci

Les années d’avant. Les deux dernières. Il y a deux ans c’était dur, si dur. L’an dernier, un sursis. Un hiver plus facile. Avoir chaud, faire quelques cadeaux pour Noël, pouvoir gâter les enfants au moment des soldes, un peu. Accepter les invitations des amis parce qu’on pourra arriver en portant un petit truc, même si ce n’est qu’une bouteille de vin pas génial ou quelques bonbons pour un enfant. Arriver en se disant qu’on va pouvoir regarder ses amis en face, parce qu’on n’a pas les mains vides. Petit bonheur intérieur dont on n’a pas conscience quand on le fait sans difficultés.
Il y a deux ans j’avais trébuché sur la fin de l’automne. La rentrée scolaire avait avalé la totalité de l’allocation de la caf. Ca sert à ça après tout…. Bon le petit problème c’était que chaque mois, dès le mois de Septembre cette même Caf m’avertissait que la Gazelle ayant eu ses 18 ans mes allocs passeraient de plus 300 euros à 60. On venait de me couper internet. Dès octobre j’ai compris ce qu’était la faim, la privation la vraie, quand il n’y a plus rien que des centimes d’euros, que le frigo ne se remplit jamais, que le froid circule à son aise entre le litre de lait, la plaque de beurre, les 6 œufs, le petit bout de gruyère, quelques yaourts blancs et tranches de jambon.
Ce dossier de surendettement je l’ai fait. Depuis le temps. Je l’ai fait et je pense être tombée sur la plus grosse peau de vache de la BdF. Recalée. J’avais été trop longue pour envoyer tous les papiers, parce que j’avais fait un choix entre quelques tranches de jambon pour les enfants et quelques timbres pour les courriers de demandes de documents. La peau de vaches m’a quand même mis sur la piste de la CAF, m’indiquant qu’en tant que femme seule j’avais encore droit à l’alloc jusqu’aux 21 ans de la gazelle. Juste avant Noël, j’ai débarqué à la CAF avec une valise de documents administratifs pour parer à toute demande. Je suis sortie avec la promesse de 1500 euros sur mon compte dans les jours suivants. J’ai ainsi pu acheter les cadeaux de Noël, et aussi payer quelques factures, et aussi eu de nouveau 300 euros par mois jusqu’aux 21 ans de la Gazelle. Depuis septembre retour à la case 2008. D’où les difficultés actuelles.
J’ai encore en mémoire ces jours où je ne pouvais plus joindre personne, plus d’internet, plus de téléphone ni portable, ni fixe. Et ce soir de novembre, si douloureux. La gazelle et son coeursonamour, installés dans la mezzanine qu’ils avaient transformée en studio, faisaient chauffer dans mon four deux grandes pizzas pour leur repas du soir en haut. Pendant ce temps les enfants, mes petits et moi, nous partagions une purée mousseline et du jambon blanc. Une tranche chacun. J’allais leur donner la mienne, à l’adolescence on a faim de plus d’une tranche de jambon. Surtout quand ça sent bon la pizza.
La sonnette a retenti. Les amis étaient là. Deux. Un panier à la main. De la soupe, des biscuits, des gourmandises pour les enfants, je ne sais plus de quoi remplir le frigo. C’était bon. Mais c’était terrible. De douleur et d’amour à la fois. Je pleurais à chaudes larmes sans pouvoir les regarder en face. On se sent mendiant assisté mais c’est juste de l’amour qui est offert. On aimerait ne jamais avoir eu besoin de ça, mais on sait que c’est ça l’amitié. Etre là. On est perdu d’en arriver là. On est reconnaissant mais plein de honte. On pleure de son orgueil blessé et aussi de l’amour donné. On met un peu de temps avant de regarder à nouveau en face. Mais on n’oublie jamais, jamais, ni la douleur, ni la douceur de savoir qu’on a la chance d’avoir encore l’amitié pour continuer à avancer.

8 commentaires:

  1. comment vous faites pour écrire si bien ces choses-là, moi j'y arrive pas, j'ai toujours l'impression d'étaler mes tripes sur le net
    (un défaut majeur dans la présentation du texte : faites des paragraphes avec passage à la ligne on lira mieux et plus…)

    RépondreSupprimer
  2. Avoir confiance en la vie... Parfois, de manière si inattendue, elle nous le rend bien.

    RépondreSupprimer
  3. C'est justement parce que je sais exprimer mes émotions par écrit que jeme permets de raconter tout ça, je me dis que tant de personnes vivent les mêmes choses que moi sans savoir les exprimer que c'est aussi pour elles que j'écris. Je ne crois pas que vous étaliez vous témoignez comme j'essaie de le faire. Pour les paragraphes il est vrai que j'écris très vite les idées et les mots sortent seuls et souvent je ne fais pas trop attention à la présentation. Promis je vais essayer Annie.
    GdeC, j'ai surtout l'espoir de jours meilleurs et j'y crois et ausi je m'accroches au petits moments de bonheur.

    RépondreSupprimer
  4. Ma petite soeur de coeur...tu m'as fait monter les larmes pfff..je t'embrasse fort ainsi que les TDC. corinne

    RépondreSupprimer
  5. J'ai connu la même chose lorsque nous sommes revenus d'Israël, j'ai eu envie de me jeter sous le métro, heureusement les amis étaient là, Méli, je t'embrasse, tu vas rebondir, tu es forte...

    RépondreSupprimer
  6. Sous vos mots, je sens une lumière qui vous fera rebondir. Ne lâchez rien, vous tenez le bon bout.

    RépondreSupprimer
  7. Pauvre d'argent mais riche de mots ma MéliMélo...

    RépondreSupprimer
  8. Aujourd'hui j'étais riche de plein de tendresse d'amour et de l'amitié de ceux qui ont aimé pierrot de la lune. Ca réchauffe aussi !

    RépondreSupprimer