lundi 13 décembre 2010

Pierrot de la Dune a eu sa journée

La douceur et la beauté d’un moment. On range un moment ses soucis au fond de son cœur, on pose un petit châle en laine dessus, juste pour accueillir ce qui va venir sans tout mélanger. Vendredi j’avais embarqué mes deux zados de TDC avec moi pour prendre la direction des Landes. J’avais même décidé de ne mettre un autre petit châle sur le conflit avec ma sœur. Me mettre en retrait de tout ça. Les zados était si en colère d’apprendre que je les déposerai à la maison de là-bas et que j’irai ailleurs où je sentirai une ambiance plus douce pour moi. Je n’aurais pas pu priver les zados et leurs cousins de retrouvailles tant attendues. Mais je n’aurais pas pu assumer en ce moment une ambiance de faux-semblants et de non dit, d’évitement des regards et des sujets qui fâchent, qui à la moindre étincelle tourne à la dispute et à l’hystérie collective. J’ai eu très mal de ne pouvoir rentre chez « moi » de ma propre volonté, et de m’en tenir à ce que j’avais décidé. Avant d’aller retrouver ma cousine dans sa belle maison si accueillante, je suis passée verser quelques larmes au bord des vagues de la plage et respirer l’odeur du sable mouillé et de l’iode.
La soirée a été gaie et je n’ai parlé d’aucun de mes soucis. Je sais à quel point ma cousine aurait été triste et émue par ma situation actuelle, mais je ne veux pas être la mendiante éternelle. Alors j’ai raconté des anecdotes à mourir de rire comme je le fais si bien quand tout va mal, puis j’ai parlé de mon boulot ça aussi ça cache bien la forêt des emmerdes.
Hier matin je me sentais plus sereine dans cette maison où il faisait chaud, où j’ai pris une longue douche avec un mélange de tous les gels et baumes que je trouvais, je sentais si bon en sortant de la salle de bain que je n’arrêtais pas de frotter mon nez sur ma peau et de respirer son odeur. J’ai eu cette vie moi aussi un jour, où chaque jour je pouvais hésiter entre le parfum du thé vert et celui de la cannelle, la douceur d’une crème et les saveurs piquantes d’un tonique.
Vers 10 heures je me suis sentie comme à l’aube d’un grand moment. La sensation d’un bonheur imminent, d’avancer lentement au fil des minutes vers des instants inoubliables. Cette petite pelote de joie un peu jubilatoire qui circulait en moi dans tous les sens et me disait c’est bon ce moment profites-en.
Puis il y a la demi-heure avant, qui passe si vite, qui file vers le moment où on plonge dans l’instant. Arrivée au port et rencontre des visages aimés d’abord. On s’embrasse, on se reconnaît, on se regarde vieilli.
Pour Pierrot de la lune et son livre fraîchement, tous étaient venus, la famille que l’on ne voit plus, les vieux amis de mamamia et papa, des inconnus qui les connaissaient…les élus, le journal, les photographes, entre cent et deux cent personnes, je ne sais pas.
Le livre était là, les photos, les affiches. La lumière du port. L’air marin. Ce port qu’il aimait tant. Les discours étaient pleins de lui. Fidèle à ce qu’il était. Il le dépeignaient si bien que nous avions l’impression qu’il allait entrer avec son sac de reporter, son pantalon « qui tombe », un vieux sweat bleu délavé, ses cheveux en bataille, son œil bleu pâle allait parcourir la salle et il allait nous raconter une histoire encore, fier d’être le pôle d’attraction et de parler à tous.
Mes sœurs et moi, mes neveux mes nièces, mes enfants, tous nous étions illuminés de lui à cet instant. Les larmes ont coulés sans tristesse mais gonflées d’émotions quand des inconnus ont pris la parole pour lire des textes de Pierrot de la dune comme l’avait appelé le député. Ma sœur a parlé elle aussi si bien, si vrai aussi sans oublier de penser à petit tonton et mamamia.
Puis tous ces amis de Pierrot, se anciens collègues ou élèves, ont tenu a venir nous voir pour nous raconter ce qu’ils avaient partagé avec lui. On nous demandait un petit mot de dédicace, quelques lignes des enfants de Pierrot. La lutine et son cousin ont joué les stars en signant à qui le demandait. Le nounours chamallow a écrit dans le livre d’or un joli mot de ses souvenirs avec son grand-père.
On aurait aimé ne jamais quitter ce moment. Le prolonger encore et encore, plus loin, plus longtemps que la petite réunion familiale d’après. Il fallait repartir. Redevenir non plus la fille de mais la femme. Se demander si on serait arrive à temps pour la soirée lecture, si avec juste presque rien dans le frigo on arriverait à berner son monde. Si on allait pouvoir chauffer un peu la maison avant l’arrivée des invités.
On parle des moments qui restent gravés, celui-ci est là et le restera à jamais. Je le garde en moi pour les moments difficiles qui m’attendent.

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