Il y a 25 ans aujourd’hui, je devenais maman pour la première
fois. Ce jour-là je me souviens précisément qu’il faisait lourd sur la campagne
bordelaise. Je portais un ensemble cousu
par Mamamia dans un tissu multicolore venu d’Afrique. L’après-midi je m’étais
ennuyée à mourir dans une église de village. Je n’aime pas les mariages. Ceux
que je vois dans les films me font pleurer mais ceux de la vraie vie m’ennuient
profondément. Heureusement je n’ai pas du me farcir la totalité de la fête jusqu’au
bout de la nuit. J’étais juste la femme du chef du marié. Ouf !!!
Pendant que je errais mon verre de Grave à la main,
impatiente de rentrer chez moi, il se passait quelque chose dans ma vie que j’étais
loin d’imaginer.
Juste à quelques kilomètres de là, dans un hôpital
bordelais, une petite fille naissait. Une naissance sûrement empreinte de
tristesse ou de douleur. Sa maman s’appelait Anne, elle avait 42 ans. J’en
avais 29. C’était son septième enfant. Trop âgée, trop usée, trop pauvre, trop
de choses à la fois certainement. En tout cas trop pour elle seule. Le papa
était reparti au Sénégal. Alors ce fut le X. Le X de la douleur de se séparer
de l’enfant qu’on a porté 9 mois. Le X à jamais pour cette femme et ce bébé qui
ne se toucheraient jamais, ne se verraient jamais. Le vide pour Anne. Le vide
pour la petite fille, pas la chaleur, ni la douceur du moment peau à peau et
des premières paroles d’amour. Un enfant qu’on emporte vite et loin. Loin des
yeux mais certainement pas du cœur.
Anne, je suis
certaine qu’aujourd’hui quelque chose vous paraît vide et douloureux. Ou peut-être
êtes vous soulagée de penser que vous avez offert la possibilité d’une autre
vie à votre bébé.
A trois mois, l’autre vie a commencé pour ce bébé gazelle,
et son père et moi, nous lui avons donné tout notre amour. Et le prénom d’une
diva, Maria.
Petite, elle me parlait de vous et me disait que vous vous
appeliez Sabrina. Elle me posait des questions sur vous mais j’ignorais tout. Je
connaissais juste le X. A douze ans, elle a voulu savoir plus de choses. Je l’ai
accompagnée dans son parcours. Cela n’a pas donné grand-chose. Un âge, un
prénom, quelques détails de votre vie et sur sa fratrie. Bizarrement, tout de même,
une petite phrase, la grande sœur avait choisi un prénom pour elle. Chose qui n’a
pas d’ailleurs été respecté à la naissance. Votre petite fille devait s’appeler
Sabrina.
Maintenant qu’elle est adulte elle ne parle plus jamais de
vous. En tout cas pas à moi. Elle ne semble pas vouloir chercher à vous
rencontrer. En même temps le X vous protège. Je pense moi qu’elle devrait
essayer de faire le chemin vers vous. Ca vie son cœur seraient moins durs peut-être.
Ma joie gazelle a le regard noir et dur. Elle ne sourit pas
beaucoup et c’est dommage car elle est si jolie quand son regard s’adoucit. Elle
travaille dur et se bat tous les jours pour son indépendance.
Elle vient de me téléphoner pour que je vienne boire un thé
avec elle. J’aurais préféré qu’elle vienne chez moi car je n’aime pas ses 7
gros chats. Ils sont tout pour elle. Elle semble plus en partage avec les
animaux qu’avec les hommes. Elle rêve du jour où elle pourra à nouveau monter à
cheval comme elle l’a fait toute son enfance et son adolescence. Elle joue avec
le cœur des hommes et celui des femmes aussi d’ailleurs…
C’est une drôle de jeune femme que votre fille Anne. Je l’aime,
je ne la comprends pas toujours mais je l’aime, et je pense à vous aujurd’hui.
Il faut beaucoup d'amour pour abandonner son enfant. Et beaucoup d'amour aussi pour s'adopter. C'est une chose au moins dont elle n'aura pas manqué.
RépondreSupprimerJ'ai découvert votre blog par un commentaire chez caro.
RépondreSupprimerJ'aime ! Le style, le ton, votre
Sensibilité et
Votre Façon d'aborder la vie et de la dire..
Merci pour ces jolis mots.