dimanche 5 décembre 2010

Dernier cri

J’aurais voulu que tout soit léger ici.
J’aurais voulu parler d’amour de voyage d’émotions joyeuses, des petites anecdotes qui font que la vie est superficielle et légère.
Mais non, là pas encore. Parce que là, la peur revient, la peur d’aller nu pieds. La peur de basculer. La peur que définitivement la chute ne puisse plus s’arrêter.
Me voilà de nouveau, encore une fois, entrain de me fermer à tout. Plus de sorties. Plus de plaisirs, plus que le nécessaire.
Déjà deux mois que mon compteur de gaz est fermé à nouveau. Deux mois à l’eau froide, glacée même depuis quelques jours. Glaciale. Deux mois de micro-toilettes au petit matin, deux mois à faire chauffer la bouilloire, quand on en a le courage. Deux mois que la lutine et moi n’avons même plus le courage de descendre dans nos chambres le soir et que nous nous glissons sous deux couettes en haut dans la mezzanine où il fait un peu plus chaud. Le nounours chamallow est plus courageux, il râle mais il se douche à l’eau froide et descend dans sa chambre en marmonnant. Demain soir le nounours et la lutine partiront chez Ken et seront au chaud pour quinze jours. J’irai mieux, je serai rassurée pour eux. Moi, je me gère mieux. Un thé chaud avec du miel, un bouquin, la télé, internet et les soirées passent en douceur.
Mais les enfants eux, on le sait, on le dit assez, les enfants d’aujourd’hui sont en demande de tout, ne supportent pas les refus. Ils ne sont surtout pas responsables des dérives de leurs parents et ne devraient pas avoir à en pâtir. Alors on tente de faire comme si…
Cet après-midi combien il était compliqué et difficile de garder le sourire pour accompagner la lutine qui réclamait depuis des semaines une sortie dans Bordeaux, pour aller chercher son cadeau chez Yves Rocher. Tout se complique rapidement quand on doit compter les centimes d’euros. Prendre le tram plutôt que la voiture pour économiser l’essence et le parking. Ok c’est plus écolo… Mais deux tickets de tram plus deux au retour ça fait 5 euros. Alors, on prend deux tickets en calculant qu’on ne pourra pas offrir un coca à la lutine si elle veut aussi acheter un petit truc chez Yves avec les 50 % de réduc. Alors on ne composte pas les deux tickets en risquant l’amande et la honte de se faire contrôler… Et puis dans sa tête on recalcule et on peut encore partager un coca, et même acheter un vernis à ongle à la lutine qui subit les sautes d’humeur constantes d’une maman un peu aux abois.
Je marchais dans cette grande rue, résonnant des chants de Noël, illuminée à outrance de doré d’argenté de rouge lamé, un peu saoule des rires des autres. Mais en moi tout s’était resserré, crispé, mon ventre me faisait mal, ma gorge brûlait et mes yeux aussi de cette envie de pleurer, de ne pas être de la fête. Je pensais à toutes ces personnes que j’aime auxquelles je ne pourrai rien offrir. Je pensais à ma gazelle, qui ne communique plus avec moi que par sms glaçants. Le matin même je lui a vais dit que je lui gardais un exemplaire du livre de son grand père, et la réponse fut « tu sais bien qu’il finira au fond d’un placard, je ne le lirai pas, donne le plutôt à ta fille… » ; la semaine précédente je lui disais que son frère était en Pologne elle me répondit « et alors », donc je dis alors rien, et elle dit « alors on s’en fout bisous ». Je marchais en pensant à des années futures où peut-être ma vie serait plus légère, où je pourrais rire avec mes filles et mon fils et les inviter dans de petits restaus pour des moments partagés. Je marchais et j’avais envie de courir, de rentrer chez moi et de ne plus voir tout ça. Je n’aimais plus cette foule joyeuse, je ne savais plus si j’avais envie de tout ou envie de rien. La lutine était joyeuse elle, elle me disait tu es belle maman, elle voulait que je regarde les vitrines, que nous restions encore. Nous avons traversé la place Pey-Berland et les stands du Téléthon, je sentais mes yeux pleins de larmes et de douleur. Je ne pouvais rien donner qu’un sourire triste et coupable d’être de ceux qui disent « non merci », je réussissais à ravaler toute ma tristesse et mes larmes inutiles.
Je ne me reconnais plus dans cette personne triste, pleurnicharde et hargneuse avec ses enfants. Je voudrais redevenir, la méli qui rit du mélo. Peut-être que le fond est atteint, enfin, celui qui m’a fait donner mon préavis et me décide à chercher un appart plus petit moins cher, à en finir et à faire tout ce qu’il faut pour racheter ce putain de revolving qui pourrissent ma vie.
Je veux que demain tout cela s’arrête. Je veux vivre légère, je veux être la méli-mélo va pieds nus parc e qu’elle l’a choisi.

2 commentaires:

  1. Bonsoir Méli-Mélo,
    Tes mots m'ont fait frémir. Je ne sais pas quoi dire. Quel amour pour tes enfants, quelle fierté dans la galère!
    Tu peux marcher la tête haute!
    Je reviendrai souvent chez toi, si tu me le permets.Puiser un peu de ton courage et marcher avec toi.
    Chaque jour qui passe pour toi, mais aussi pour moi, est une victoire contre le sort, les cons indifférents et l'injustice de notre société.
    Bonne nuit à toi.

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  2. Merci Hélène, ce mot me touche beaucoup car j'ai tellemnt peur d'en dire ou d'en montrer trop, de faire du nombrilisme, Ce soir dans ma voiture je réfléchissais et me demandais si je devais raconter tout ainsi. Alors maintenant je vais peut-être me dire qu'il y a au moins une personne qui comprend ce que j'écris.

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