samedi 27 mars 2010

On n'est jamais aussi bien que les pieds nus. Libre. Quand je chantais j'enlevais mes chaussures. Va savoir pourquoi... Sur le terrain, en fouille, mettre des chaussures est obligatoire, à bouts coqués en plus, le soir quand tu les enlèves que tu retrouves le contact direct du sol, c'est un petit plaisir juste doux, juste égoîste, une sensation de libération. Quand je suis au bureau et qu'il fait chaud, je me balade partout pieds nus, c'est bon !!!! Et sur le sable au bord de l'océan, et sur un plancher qui chante, et sur une moquette toute douce, et sur une mosaïque fraîche en été, et dans la boue, et sur les galets polis ou les petits cailloux. Les godasses c'est pour le bithume, et pas autrechose.
Je vais pieds-nus partout. Je vais nus pieds. Je suis une va pieds nus, et je crois que je ne suis pas sauvée de mon flirt avec le "va-nu-pieds". Le va-nu-pieds, le précaire, le pauvre, celui qui a tout perdu même ses chaussures, celui qui ne peut même pas s'acheter une paire de godasses, et qui les porte ouvertes à tous les vents, toutes les eaux et les neiges, à tous les jours de chaleur, ficelées, recollées, décollées, celui qui ne les enlève jamais justement. Il me donne la peur au ventre. Je le regarde et je me demande quelle est la seconde, la minute ou le jour de sa vie où tout est devenu irrémédiable. Il me donne les larmes quand moi avec mes chaussures, ma voiture, mon travail, ma maison, je n'ai aucun centime d'euro à mettre dans sa main, parce que moi non plus je ne les ai pas. Parce que je sais que la pièce que je lui donne, je la chercherai désespérément à la fin du mois pour aller m'acheter un peu de fromage. Mais quand on est au début du mois et que je sors de la poste avec mes alloc caf, je lui tends 10 euros parce que je ne pourrai pas ne pas partager.
J'aime me dire que je suis une va-pieds-nus, parce ça me donne du soleil dans la tête. Va-pieds-nu c'est moi, qui marche le long de la vague qui meurt sur le sable, sur ma plage d'hossegor. Et ça juste d'y penser je vais mieux, je vais bien, et je peux arrêter de pleurer, et rire de ma vie.

1 commentaire:

  1. Sylvie, c'est superbe! Et tout en dignité. C'est ce que j'aime quand je te lis, c'est discret et beau... Tu devrais écrire un livre de petits textes beaux comme des petits caillous dorés...

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